samedi 29 février 2020

Valse tropicale et aérienne en faisant un tour aux Seychelles.


Le principe a été établi par les linguistes. En linguistique, on le désigne sous le nom de conservatisme des zones périphériques. Si vous voulez observer un phénomène de langue ancien, il faut regarder non au centre de la zone géographique considérée mais sur ses marges et le plus loin possible même. En musique, le principe fonctionne aussi bien qu'en linguistique et si vous voulez avoir une idée des modes musicales en France dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, et bien, allez donc jeter une oreille dans le répertoire de ces vieilles France les plus périphériques qui soient, celles des colonies les plus anciennement perdues. A ce titre, Haïti ou le Canada (avec son surgeon cajun) sont de formidable conservatoires. Mais c'est aussi le cas, et c'est bien moins connu, des Seychelles. Le Cellule est donc ravie de vous embarquer pour cette Cythérée de l'océan Indien et de vous inviter aux noces "à l'antiquité" qu'on y célèbre en musique. Bernard Koechlin est parti là-bas pour nous (et surtout pour le label Ocora) et y a enregistré, le 12 janvier 1977, un ensemble formé par Jean Baptiste, Marc Monthy, Sadi Barlett, Maxime Leon, Raphaël Labiche, Raymond Alissop et Alex Melanie, soit deux violons, un banjo, un triangle (ah le triangle! ici comme chez les Acadiens), deux guitares et une grosse caisse agrémentée d'une cymbale, auxquels il faut encore adjoindre le commandeur qui dirige de la voix les opérations chorégraphiques. Vous verrez, le plaisir est loin d'être seulement archéologique : la valse vous conviera aux réjouissances avec une légèreté sans pareille et la contredanse qui suit vous excitera sans doute aux grandes prouesses. 






vendredi 21 février 2020

Les pinceaux du rock : deux minutes d'euphorie avec Václav Neckář

Nous sommes à Prague en 1967 et l'idéologie s'attiédit franchement (le prochain regel est déjà tout proche mais personne n'en sait rien). L'euphorie gagne naturellement les chanteurs populaires issus de la vague bigbeat et parmi eux Václav Neckář n'est pas le moins enthousiaste quand il prend les pinceaux du rock pour une délicieuse miniature à la Del Shannon. Bien sûr, il n'est pas Léonard ou Michel-Ange, tout juste un amateur, mais quand on peint avec tout son cœur, l'euphorie est vite contagieuse, d'autant qu'en tchèque "je peins" (maluju) et "j'aime" (miluju") c'est comme qui dirait kif-kif et bourricot.

Václav Neckář - Miluju a Maluju (1967)


PS : En guise d'illustration, une toile d'Otakar Mrkvička (1898-1957) qui réinterprète les poncifs du cubisme parisien en leur imprimant une torsion toute particulière à l'époque du groupe Devětsil, dans les années 20, autre moment d'euphorie dans la culture tchécoslovaque (avant d'autres tensions).

mardi 18 février 2020

Au fond du tiroir aux merveilles oubliées : le folk d'Appaloosa (1969)

Voilà une pépite fort peu connue. Elle vient de Cambridge, Massachusetts, où en l'année 1969, un duo de jeunes gens, John Parker Compton et Robin Batteau fondèrent un groupe de folk acoustique (ensuite étoffé) qui retint l'oreille du producteur Al Kooper et qui enregistra un seul et unique opus bien oublié au fond des tiroirs de l'histoire. La Cellule sort son plumeau le plus fin pour ôter l'inexorable poussière et vous mettre ce bijou de sophistication apaisée et lettrée entre les oreilles. Commençons par un morceau euphorisant :

Appaloosa "Bi-Weekly" (1969)


Puis celui-là avec ses arrangements de cordes tout aussi léchés et plein d'entrain.

Appaloosa "Rivers Runs To The Sea" (1969) 


Et enfin, un morceau très délicat qui prend pour thème plutôt incongru le "paradoxe hydrostatique" connu en France sous le nom de "Principe de Pascal".

Appaloosa "Pascal's Paradox" (1969)









samedi 15 février 2020

La very boxe catalane : Pascal Comelade vs. Arthur Cravan

Cela faisait bien trop longtemps que je n'avais pas écouté l'excellent Traffic d'abstractions du non moins excellent Pascal Comelade et j'avais complètement oublié son ouverture cravanesque. Arthur Cravan est bien la fine fleur de nos émotions ce matin :

Pascal Comelade "Arthur Cravan Was a Flor Fina" (1993)

Mais puisque nous sommes lancés en pays de connaissance, ne négligeons pas la suivante sous influence falceto-éthiopienne, nous dit le livret.
 Pascal Comelade "The Skatalan Logicofobism" (1993)


Pour la soif, ajoutons encore une célèbre reprise de Bob Dylan.

Pascal Comelade "Like A Rolling Stone" (1993)


Et enfin, ce morceau de circonstance.

Pascal Comelade "L'Orchestra del Titanic plays That's amore" (1993)




mardi 11 février 2020

Fin de soirée à Bulawayo (Zimbabwe) avec Sabelo Mathe


Retour à Bulawayo aujourd'hui avec Sabelo Mathe qui siffle la fin de la party d'une manière dont vous n'avez pas l'habitude (même s'il vous arrive régulièrement de faire la clôture des débits de boisson). Il faut dire que ce guitariste très méconnu est un émule de son compatriote Josaya Hadebe (en photo ci-dessus), le crac du style omasiganda dans lequel se coule l'influence des guitaristes zoulous et celle de la country. Nous sommes en 1955 et c'est donc un cow-boy du Zimbabwe qui vous indique que là, c'est terminé, le bar est vraiment fermé et qu'il va falloir rentrer à la maison. Pas la peine d'insister.



Le titre se trouve sur la magnifique compilation Bulawayo Blue Yodel du label Olvido Records qu'on découvre et qui semble parfaitement excellent. Allez donc voir le programme par là. Et si vous êtes curieux de Josaya Hadebe, le cow-boy séminal de la musique zimbabwéenne, allez donc voir par ici le post dédié sur le merveilleux blog electricjive.

samedi 1 février 2020

L'adolescence dorée du Ghetto : le Har-You Percussion Group (Harlem, 1968)


Il n'est jamais trop tard pour découvrir les classiques insubmersibles comme l'unique album du Har-You Percussion Group en 1968. L'histoire est belle car l'ensemble est composé d'adolescents de Harlem (entre seize et dix-neuf ans) venant de bénéficier des activités proposées par le Harlem Youth Opportunities Unlimited (Har-You), et tout spécialement d'une initiation plus que poussée aux grandes heures de la musique noire américaine (jazz, blues et une haute dose de musique afro-cubaine) sous la houlette du percussionniste Montego Joe. Le résultat est un merveilleux disque dont vous ne pourrez bientôt plus vous passer. Voyons d'abord le magnifique "Oua Train" qui illustre la veine plus jazz


Puis le jubilatoire, "Welcome To The Party", bourré à craquer de tonus afro-cubain.