lundi 30 septembre 2019

Collision : la rumba en swing


Nous sommes en 1947 et la fine fleur de la musique cubaine est de plus en plus tentée d'aller secouer le cocotier de la réussite dans les frimas du nord de l'Amérique. C'est ainsi à New-York que se retrouvent le grand conguero Chano Pozo, Arsenio Rodriguez le génial guitariste aveugle avec sa guitare à trois cordes (tres) ainsi que Machito et tout son orchestre flamboyant. On organise alors quelques séances d'enregistrement mythiques où les meilleurs musiciens afro-cubains se frottent volontiers au swing local. 

Chano Pozo y su Conjunto (avec Arsenio Rodriguez) "Seven Seven" (1947) 


Machito et son orchestre, avec Chano Pozo et Arsenio Rodriguez "Rumba en Swing" (1947)


Peu de temps après, Chano Pozo sera embarqué par Dizzie Gillepsie dans l'aventure be bop et aura un rôle fondamental dans la fusion du jazz moderne et des musiques afro-cubaines. Le voyage sera intense mais bref. Après avoir créé avec Diz plusieurs des morceaux les plus emblématiques du genre naissant Chano Pozo se fait flinguer à Harlem, au mois de décembre 1948. Il n'a que 34 ans. Mais c'est encore une autre histoire.

samedi 28 septembre 2019

Crin crin sauvage : Harry Choates (1949)

Le roi du fiddle chez les cajuns de la Louisiane, c'est Harry Choates et puis c'est chouette, Harry Choates mais ça déménage. Essayez donc voir ce boogie de 1949. On a pas attendu que vous naissiez pour swinger comme des sauvages! Vous reprendrez votre souffle un autre jour.
 
Harry Choates - Louisiana boogie (1949) 



vendredi 27 septembre 2019

Collision dans le bayou : cajun goes rumba




C'est un des derniers enregistrements de l'étiquette Khoury si importante pour le renouveau de la musique cajun à la fin des années 40. Nous sommes en 1956 et le tsunami du rock'n'roll vient momentanément de recouvrir la vague des enregistrements cajun. Les musiciens francophones du bayou se mettent à tenter des choses improbables. C'est ainsi que le grand accordéoniste Nathan Abshire s'adjoint le concours de la toute jeune Yvonne LeBlanc, 14 ans, pour une expérimentation cajun rumba complètement défrisante.

"Nathan Abshire et Yvonne LeBlanc - Mama Rosin (c. 1956)"


Le titre est mythique et donnera son nom à un groupe de cajun revisité, qui faisait encore le bonheur des soirées de Genève il n'y a pas longtemps (mais qui est apparemment en sommeil depuis cinq ans). Le grand spécialiste qui tient le blog early cajun a repéré les sources cubaines du morceau, qui viennent sans aucun doute d'un classique de la rumba composé par Eliseo Grenet, "Mama Inez". Mais voyez comme les choses se compliquent délicieusement : c'est apparemment la version de Maurice Chevalier (en anglais!), devenue une ode à la "Môme Inès", qui a inspiré le plus directement les cousins du bayou.

Maurice Chevalier "Mama Inez" (1931)



mercredi 25 septembre 2019

L'instru cajun qui tue : mardi gras rock'n'roll

Nous somme vers 1954 et quand Aldus Roger, un des maîtres de l'accordéon local, réunit les playboys de Lafayette avec l'idée de reprendre un des morceau les plus traditionnels de la Louisiane tout d'un coup (sans doute l'air du temps) la fête prend un côté rock'n'roll méchamment accentué, vous trouvez pas?
 
"Mardi Gras Dance"


 Et si vous voulez en savoir plus, allez voir (une nouvelle fois) le mirifique blog Early Cajun Music.



mardi 24 septembre 2019

Et là bas (à La Nouvelle-Orléans en 1951)

C'est une chanson créole traditionnelle qui traite de nourriture, de beaucoup de nourriture et même peut-être de beaucoup trop de nourriture. A La Nouvelle-Orléans, on ne mégote pas ni avec le goût ni avec les quantités. La version que je préfère est celle de Paul Barbarin, qui a joué comme batteur avec les plus grands King Oliver, Louis Amstrong, Red Allen, Sydney Bechett et qui, à la cinquantaine, a fait aussi quelques disques solos comme celui-là qui date de 1951. Et au fait, vous là-bas, comment ça va?

 
Musicien néo-orléanais jusqu'au bout des ongles, Paul Barbarin est mort d'une crise cardiaque en 1969 alors qu'il jouait lors de la parade du Mardi Gras!

vendredi 20 septembre 2019

Autour du bayou (4) : Nathan Abshire, l'empereur de la musique cajun

"Nathan Abshire est la grande légende de la musique cajun, au même niveau que Muddy Waters pour le blues, Professor Longhair pour le rhythm'n'blues ou Hank Williams pour la country. La musique cajun par excellence, c'est lui, avec un voix pleine de cœur, un jeu d'accordéon virtuose, un accompagnement magnifique - souvent par les Balfa Brothers - et un répertoire pioché dans les marais les plus obscurs de l'histoire cajun" (Lyle Ferbrache).

Voilà, comme ça les choses sont posées. Ajoutons que Nathan Abshire insuffle une tonalité blues à toute sa musique qui lui donne une puissance incroyable. Mais illustrons maintenant ces propos avec une petite sélection de ses disques tardifs du milieu des années 60, enregistrés avec les Pine Grove Boys sous l'étiquette Swallow.

Tout d'abord le "Pine Grove Blues" (1966) qui groove à mort dans le bosquet, avec son violon génial, un guitare slide magnifique et l'accordéon encore au-dessus du lot :

Passons ensuite à une ode endiablée à la vie sur le bayou du Courtableau. Eh le monde, c'est le temps de ramasser les écopeaux, de faire bouillir les tourloulous, d'ébouillanter les ouaouarons et d'avaler enfin ces maudites écrevisses!

"Sur le Courtableau" (1965)


Et puis, on enchaîne avec "Lemonade Song" (1966). Pour l'occasion c'est Thomas Langley qui prend le micro et qui nous entraîne à 200 à l'heure dans l'épopée de la gueule de bois éternelle sur l'air d'une vieille chanson créole de La Nouvelle-Orléans pleine d'épices caribéennes. 

[Oui, je suis d'accord avec vous : bizarre, bizarre, la vidéo qu'on trouve sur youtube...]







dimanche 15 septembre 2019

Autour du Bayou : en apnée avec Johnny Jenkins (1970)

La Louisiane de Johnny Jenkins est un marais d'adoption. Le guitariste est en effet originaire de Macon en Géorgie (pas en Saône-et-Loire). Et oui, comme le jeune Otis Redding, qui d'ailleurs jouait quelquefois avec ses Pinetoppers et faisait office aussi de chauffeur.

C'est ainsi qu'un beau jour de 1962, Otis conduisit Jenkins à Memphis dans les studios de la Stax pour une session d'enregistrement mais il arriva que ce fut Otis qui prit le micro pendant une pause, qu'il enregistra alors "These Arms Of Mine" (avec Jenkins à la guitare) et que ce fut Otis Redding qui devint la plus grande étoile de la soul music. Jenkins n'enregistra quant à lui qu'un seul single pour le label, un instrumental génial au demeurant ("Spunky" en 1964), puis ce fut le temps d'un long silence. 

Ce n'est qu'en 1970 qu'il revint sur le devant de la scène en homme des bayous inquiétant avec un album Ton-Ton Macoute sous forte influence de Dr John, qui venait d'enregistrer son séminal Gris-Gris. L'accompagnaient dans cette aventure Duane Allman et certains de ses amis (comme le génial Eddie Hinton placé pour une fois aux percussions). Le résultat est un disque de blues-rock hanté par le vaudou qui s'ouvre par une reprise de Dr John.

"I Walked On Gilded Splinters"


La version de Jenkins aura d'ailleurs une belle postérité, puisque Beck la samplera pour son premier tube "Loser". Ton-Ton Macoute compte quelques autres précieuses pépites comme "Sick and Tired" avec son pur groove de La Nouvelle-Orléans. A tomber par terre, plus encore que l'original de Chris Kenner :

"Sick and Tired"


Mais l'album entier est excellent! Je crois que je l'ai vu passer par là.


samedi 14 septembre 2019

Au bord du bayou : désespoir cajun

C'est un petit mystère de savoir pourquoi Jimmy Newman choisit le nom de Jimmy Durbin quand il quitta le groupe de Chuck Guillory pour tenter l'aventure en solo. Sur son 45T de 1949, le désespoir lui inspire une valse déchirante, accompagnée par un piano de bastringue et une steel guitar pleine de classe. Rupture et saoulerie, l'enchainement est implacable.
Jimmy Durbin "Drunkard Waltz" (1949)

Pour tout savoir, sur ce titre, allez donc voir cet excellent site consacré à la musique cajun, auquel j'emprunte la photo et la transcription de la valse du poivrot dépité :

Eh, malheureuse, toi t'après m'quitté,


Eh, chère 'tit monde, quoi tu vas brailler?

Quoi tu m'a dis, tu voulais plus m'amer,

Eh, malheureuse, mon j'suis parti m'soûler.  

Eh, jolie monde, toi jolie coeur,
Eh, malheureuse, toi te m'fais du mal.
Quoi tu m'a dis, tu voulais plus m'amer?
Eh, malheureuse, mon j'suis parti m'soûler.












mercredi 11 septembre 2019

Au bord du Bayou (1), Joel Scott Hill, John Barbata et Chris Ethridge (1971)

On peut dire qu'il y a du beau monde autour de la table de L.A. Getaway, ce disque méconnu de 1971 : Joel Scott Hill jouait aussi avec Canned Heat, John Barbata avec les Turtles ou le Jefferson Airplane et Chris Ethridge est un des fondateurs des Flying Buritto Brothers. Et les invités sont aussi à la hauteur : Leon Russell, Clarence White ou Dr John qui nous intéresse plus particulièrement aujourd'hui et qui offre à ce disque psyché roots une de ces comptines hantées dont il a le secret (tout en se mettant au piano).
 
Craney Crow
 
 
 
 



mardi 10 septembre 2019

Tennis de Table



Je ne sais pas comment ça se joue en Guadeloupe, mais ça a l'air vachement violent le tennis de table antillais. Visiblement on échange y aussi volontiers les mandales que les balles blanches. Super pochette, super disque par le pilier de la culture Gwo Ka le chanteur et tambourinier Guy Conquette (qu'on retrouve selon les disques orthographié Guy Conquête, Gui Conquet, Konkèt).


 

Un tel tube n'a pas échappé aux colombiens de Wganda Kenya qui l'on repris quasiment à l'identique.


mercredi 4 septembre 2019

Un classique oublié : le premier album de Ron Davies (1970)

Une pochette colorée, des musiciens de grande classe, un songwriting plein de finesse et d'intensité, le premier album de Ron Davies, "Silent Song Through The Land" avait tout pour être un classique mais il est resté presque inconnu. Pas tout à fait tout de même, puisque David Bowie lui emprunta "It Ain't Easy" qui figure sur Ziggy Stardust, tandis que la structure de plusieurs de ses chansons semblent aussi avoir eu une forte influence sur lui. Une troublante impression de déjà entendu risque donc de vous surprendre en écoutant ce disque mâtiné de soul et de country, enregistré à Nashville en 1970, que la Cellule vous propose aujourd'hui en entier.


Pour quelques informations sur Ron Davies, vous pouvez aller voir le site que lui a consacré sa sœur, où l'on trouve cette photo avec ses amis Robert Dobson et Townes Van Zandt.