vendredi 31 juillet 2020

Quand le gospel suit un rythme cubain : Mahalia Jackson au sommet de son art (1954)

Le 10 mai 1954, Mahalia Jackson est en studio avec on ne sait trop qui. Aux bongos, aux maracas ou à l'orgue (renversant, l'organiste!), ce ne sont que des musiciens excellents mais parfaitement inconnus. Le temps de cette session new-yorkaise, la grande Mahalia Jackson se laisse entraîner par les rythmes cubains et c'est sans conteste un des disques de gospel les plus enthousiasmants jamais sorti qui en résulte. "On My Way" est un pur classique et un chef d’œuvre d'énergie quasi rock'n'roll :

Mahalia Jackson "On My Way" (1954)


Sur la face B, "My Story" offre une variante hantée et cinématographique de ce syncrétisme improbable cubano-gospel.

Mahalia Jackson "My Story" (1954)



lundi 27 juillet 2020

Reggae pour l'été : John Holt, 1972-1973.

Au début des années 70, après la vague rocksteady, la musique jamaïcaine suit résolument un mouvement orienté vers des racines réelles ou réinventées. C'est cette route qui dominera (et heureusement car c'était indéniablement la plus riche). L'histoire n'était pourtant pas écrite d'avance et un autre voie plus pop aurait aussi pu emporter le morceau. Certains hésitèrent entre les deux directions. En 1973, c'est le cas de John Holt, auparavant chanteur des fameux Paragons. Son album Time Is the Master comporte quelques violonades superflues mais n'en compte pas moins des morceaux excellents sous influence musicale du renouveau roots mais plus portés sur les méandres de la vie amoureuse certes que sur le revival jah-jah. Pour l'été, c'est léger. Pour l'été c'est parfait, peut-être. Remontons donc le temps :

John Holt -Time Is The Master (1972)


Et puis, il y a aussi sur le disque ce pur chef d’œuvre. Quoi qu'en pensent les puristes, une des merveilles de la Jamaïque.

John Holt "Riding For A Fall" (1972)


jeudi 23 juillet 2020

Très acidulé : le kwela et autres friandises nécessaires d'Afrique australe (1940-1960)

La Cellule diffuse aujourd'hui l'énergie des townships sud-africains en célébrant le moment musical dominé par le kwela et le son acidulé de la flute (tin whistle). Le premier morceau se trouve sur un 78T de 1940 :

Sophtown Cool Seven - Sophtown Special (1940)

Mais il n'y a pas que la flûte, les crins-crins du coin ont aussi de quoi vous déboucher les esgourdes avec l'acidité appropriée.

Josiah Khuzwao & his String Band - Emkhumbane (1960)

Et l'harmonica fera au besoin des merveilles. Pur euphorisant!

Sample Siroqo - Baya Yuma (1960)

Toutes ces pépites viennent du premier volume des compilations "Township Jive & Kwela Jazz" sur le label Soul Safari qui explore l'âge des 78T en Afrique du Sud et que l'on vous recommande ardemment.






samedi 18 juillet 2020

Chélonéphilie instrumentale : beauté pure du Cap-Vert


La Cellule vous invite sous sa carapace aujourd'hui pour vous régaler d'un morceau de Baltasar Januário Lima de Barros, connu sous le nom de Nhô Balta, grand musicien engagé dans la lutte anti-coloniale. La chanson, une morna, est dédiée aux tortues mais c'est la version instrumentale que l'on vous propose. Nhô Balta est accompagné par le groupe Black Power. Le titre est paru en 45T, peut-être vers 1977, sur le label A Voz da Capo Verde. Guitare, orgue, clarinette... c'est magique.


mardi 14 juillet 2020

La magie d'Arsenio Rodriguez : un pur chef d'oeuvre méconnu (1963)


Malgré les louables efforts de Marc Ribot ou de Ry Cooder, les disques d'Arsenio Rodriguez, l'aveugle merveilleux de la muisque cubaine restent plutôt méconnus (sur la Cellule, voir déjà ici et ici). Son magnifique disque de 1963, par exemple, "Arsenio Rodriguez y su Magia" n'est pas souvent rangé parmi les classiques indispensables à avoir nécessairement dans sa discothèque, bien à tort. Le roi de la "tres", cette guitare à trois cordes doublées y lorgne à la fois vers ses racines africaines, son grand-père était originaire du Congo (la traite ne s'est arrêté qu'en 1882 à Cuba, barbarie prolongée mais aussi contact direct rapproché avec l'Afrique) et la modernité du rhythm and blues. L'album est terriblement varié, du chant de révolte en hommage aux esclaves marrons (cimarrons, en espagnol) puisant au plus vital des sources africaines :

Arsenio Rodriguez "Compay Cimarron" (1963)


Passant par la douceur cubaine typique du sublime "Mona"


Sans s'interdire de mêler des éléments plus US comme dans le joyeux syncrétisme de "Quidembo Hot"


Mais c'est tout le disque qu'on écoute avec jubilation. Vous auriez tort de ne pas aller le pêcher fissa sur le mirifique blog aural joy

Et bonus, voici un peu de lecture avec les notes de pochettes qui sont, une fois n'est pas coutume, tout à fait instructives :


 

jeudi 9 juillet 2020

Minimalisme reggae, plagiat par anticipation et aussi comme le goût du tango : Augustus Pablo



Il n'est jamais trop tard pour découvrir les classiques du mélodica. Au début, on peut trouver la chose un peu fade (je l'avoue) et puis elle fait son nid entre vos deux feuilles de choux et on se retrouve rapidement accros à ses adaptations pleines de mélancolie minimaliste. Prenez, par exemple, un joyaux de Ken Boothe, mettez-le à la diète, remplacez le thème amoureux par une inspiration rastafari (pour un instrumental, ça ne coute pas cher - changer seulement le titre) et laissez faire le mélodica.

Augustus Pablo "Jah Light" (1977)


Le maître du genre est Augustus Pablo, qui diffusa le son du petit piano de bouche dans toutes les seventies jamaïcaines à la manière d'une irrésistible épidémie. East Of The River Nile est un de ses albums phare enregistré en 1977 dans les studios de Lee Perry. Le morceau suivant en est tiré comme tous ceux de ce post :

Augustus Pablo "Africa (1983)" (1977)


Intensément jamaïcaine, la musique d'Augustus Pablo essaima un peu partout. En France, Pascal Comelade fut à n'en pas douter un de ses plus attentifs auditeurs, si bien que certains morceaux d'Augustus Pablo pourraient presque passer pour des plagiats par anticipation de ceux du catalan magnifique. Oui, il y a comme un goût des tangos de poche de Comelade dans ce reggae-là, vous ne trouvez pas?

 Augustus Pablo " Sounds From Levi" (1977)