mercredi 24 août 2022

cannibalisme et feuilles de ficus : les merveilles du label CAIFE (Quito, 60's)

 

Depuis deux petites années, Honest Jon's Records s'est attelé à la belle tâche de faire découvrir au reste du monde les merveilles jusque-là très parfaitement cachées produites par le label CAIFE, à Quito dans les années 60. Leur dernier disque (un double 33T très richement rempli) est consacré à un artiste brésilien : Dilson de Souza, exilé durant la période de l'autre côté des Andes. Sous le nom de Biluka (ou Biluca), celui-ci illustra l'art peu répandu de jouer avec des feuilles de ficus. Au Brésil, il avait fondé un trio jazz pour donner un écrin à son instrument fétiche qui sonne un peu comme une clarinette naturelle, plus acide que la vraie. Un disque parut chez RCA en 1954, aimablement anecdotique. Mais c'est en Équateur qu'il trouva un accompagnement à la hauteur de sa virtuosité. Le folk andin sophistiqué qu'on cultivait alors chez CAIFE était parfait pour mettre en valeur ses prouesses. Si le résultat sonne bien plus équatorien que brésilien, Dilson de Souza choisit néanmoins de baptiser son groupe d'un nom se référant à son pays de naissance, et en particulier au mouvement cannibaliste, avant-garde qui émergea à la fin des années 20 (voyez une présentation ici). Le résultat est magnifique et aussi neuf à nos oreilles que possible. Deux illustrations seulement suffiront sans doute à convaincre tout le monde. L'inquiétant et funambulesque "Pujili" :

Biluka y Los Canibales "Pujili"

 


Et le très entêtant "Rosa Maria" 

Biluka y Los Canibales "Rosa Maria"


On se procure toutes ces merveilles ici.

 



jeudi 4 août 2022

Ma vie sans moi (16) : John Martyn (1973)

Dans notre anthologie des chansons de marasme, ce morceau du guitariste écossais John Martyn a toute sa place parmi les sommets du genre. On le trouve sur Inside Out, album qui fait suite en 1973 à l'indépassable Solid Air.  

Dans certaines circonstances, pleurer, voler, étouffer : est-ce vraiment si différent après tout?

John Martyn "Ways To Cry" (1973)


 


mercredi 3 août 2022

Minimaliste, archaïque, sublime : Roscoe Holcomb

Quand les animateurs du renouveau folk d'après-guerre découvrir Roscoe Holcomb au fond du Kentuky à la fin des années 50, les morceaux que jouaient ce sublime banjoïste étaient déjà d'un archaïsme patent, et au sein même de sa propre famille, la tradition qu'il illustrait paraissait bien surannée. L'aridité, le minimalisme de ses interprétations faisait se toucher le plus ancien et l'avant-garde dont les partis-pris n'étaient pas plus radicaux. Aussi libre d'influence académique que de toute préoccupation commerciale, la musique de Roscoe Holcomb est d'une pureté impressionnante. On a là affaire à un art parfaitement domestique nullement mâtiné d'aucune ambition professionnelle. Parmi les titres réunis sur l'anthologie hautement recommandable, The High Lonesome Sound (Smithonians-Folkways, 1998), le standard country-blues "Trouble In Mind" est sans doute un des plus poignants.

Roscoe Holcomb "Trouble In Mind" (1959)