A la croisée du rock instrumental dérivé des groupes comme les Ventures et des traditions locales (cumbia, guajira), Los Destellos créés en 1968 ont enchanté les seventies péruviennes fournissant chaque année un ou plusieurs albums. En 1975, ils sortent l'album Linda Chiquilina, en intégrant à leur son quelques claviers d'époque furieusement bien sentis. Deux des meilleurs titres célèbrent des jeunes femmes à qui nous rendons à notre tour hommage :
Los Destellos - Natalia (1975)
Los Destellos - Linda Chiquilina (1975)
En bonus, n'oublions pas leur tube interstellaire, le chef d’œuvre de la cumbia wah-wah, l'ode immortelle à la gloire de toutes les Patricia!
Los Destellos - A Patricia (1971)
Ce dernier morceau est bien connu pour avoir figuré sur plusieurs compilations fameuses. L'étiquette Vampi-Soul vient de sortir une excellente sélection entièrement consacrée aux Destellos. Le plus sage est encore de se jeter dessus sans plus attendre.
Avec Los Sicodélicos, on sait comment ça commence (en gros le truc beat habituel et par exemple l'intro de "Paint It Black") mais ensuite ça se complique de manière plus ou moins improbable et on se rend compte que le Chili comptait lui aussi (au moins) un groupe joyeusement inventif et jubilatoire dans les sixties.
Los Sicodélicos "I'm a Beast / Soy una bestia" (1968)
L'album entier ("Sicodelirium")est tout à fait agréable :
Évidemment, l'occasion est bonne de saluer nos amis chiliens et leur magnifique soulèvement!
On n'avait vraiment rien dit jusqu'ici sur la Cellule de la musique malgache qu'à la vérité on ignorait honteusement, mais tout est en train de changer avec la magnifique compilation que le label Strut vient de consacrer aux productions de la grande île rouge. On ne prend pas même le temps de noter les renseignements les plus élémentaires pour vous vanter cette petite merveille et vous mettre entre les oreilles un morceau parfaitement renversant qui procure une euphorie comparable aux morceaux les plus stimulants du Kenya ou du Zimbabwe (par exemple), avec un son qui lorgne très curieusement du côté des productions indie des années 80 (qu'on ne devait pourtant guère connaître à Tananarive) :
Joseph Kabasélé, dit le Grand Kallé, vient de prendre le micro pour vous exposer ses tourments amoureux. L'African Jazz est là pour le soutenir avec grâce. Nous sommes en 1966 ou 1967 et c'est terriblement décalé de roucouler ainsi sa peine dans un français hors d'âge, que l'on soit sur les bords du Zaïre ou sur ceux de la Seine. Merveille de l'anachronisme!
Quand la vague beat déferle sur l'Europe des années 60, rien ne l'arrête, pas même le rideau de fer. En arrivant en Tchécoslovaquie, le genre devient le bigbeat et sa meilleure illustration vient d'un groupe au nom exotique : les Matadors. Rien à voir avec la corrida cependant, c'est d'abord le nom d'un orgue électronique fabriqué par une marque est-allemande avec qui le groupe est en contrat. Les Matadors ne produiront qu'un album et une poignée de 45T sur l'étiquette nationale Supraphon, ce qui est bien dommage car c'est un des tout bons groupes des sixties toutes origines géographiques confondues, avec un son quelquefois très proche de celui de Manfred Mann. Leur tube, c'est Zlatý Důl / Hate Everything Except Of Hatter, qui existe en tchèque et en anglais. Évidemment, c'est en tchèque que nous vous le proposons.
The Matadors "Zlatý Důl" (1967)
" Get Down From The Tree" est aussi un titre de première bourre. Vous le connaissiez peut-être du reste, puisqu'on le trouvait sur le second coffret des fameux Nuggets.
Townes Van Zandt fait partie de ces quelques musiciens qui ont fait vraiment trop peu de disques pour nous rassasier. On se jette sur la moindre miette qui parait en réédition parce qu'elle peut cacher une pépite. Parmi les démos de 1971-1972, période faste, publiées sous le titre "Sunshine Boy", on trouve par exemple une magnifique version de Pancho & Lefty dépouillée de ses cordes et cuivres et qui sonnent tout aussi bien sans (pas nécessairement mieux mais tout aussi bien) :
Gene Clark après sa rupture avec les Byrds a un temps poursuivi son aventure musical avec le génial banjoiste Doug Dillard dans une veine qui intègre une forte dimension country bluegrass. En mai 1969, entre les deux albums, se glisse dans la courte discographie du duo une petite merveille de 45T qui fut longtemps mythique parce qu'on ne retrouvait la chanson-titre nulle part ailleurs.
Dillard and Clark "Why Not Your Baby" (1969)
Le songwriting est fameux et tendrement désespéré. C'est à la fois enraciné dans le meilleur de la tradition et produit avec une magnificence de cordes inouïe. C'est une chanson qui me fait toujours décoller. Un peu dans la même direction que les BO d'Ennio Morricone.
Sur l'autre face, "Radio Song" est une sacrée réussite aussi.
Dillard and Clark "Radio Song" (1969)
PS : Ce morceau fétiche m'est revenu entre les oreilles ce matin en écoutant une K7 de fan élaborée par un fin connaisseur qui a choisi de réagencer le second album du duo réputé un peu moins bon que le premier. Le résultat est excellent. On trouvera d'autres heureuses manipulations de cet obsessionnel compulsif plein de délicatesse sur son blog : "its lost its found".
1960. Jean Serge Essous, animateur des soirées chaudes de Brazzaville,est un des grands introducteurs des rythmes afro-cubains dans la capitale de l'autre Congo. Le nom de son orchestre Rock-A-Mambo pourrait vous induire en erreur car c'est plutôt du côté du cha-cha-cha et du son que les racines musicales du groupe sont à chercher. Pour illustrer le genre avec classe, Jean Serge Essous n'hésite pas à faire traverser le grand fleuve à la fine fleur des musiciens de Kinshasa, et notamment à l'orchestre African Jazz dans son ensemble ou presque. Joseph Kabassélé (alias le Grand Kallé) et Rossignol se partagent le chant, Nico (l'immense Dr. Nico) et Tino sont à la guitare, Essous a gardé la clarinette et Roitelet est à la basse. Autour dire qu'il est difficile de réunir une pléiade plus lumineuse dans le ciel de la rumba congolaise. Si la musique cubaine est réinventée avec une virtuosité qui ne laisse rien à désirer, pour ce qui concerne les paroles, l'espagnol est de contrebande garantie pur sucre. Rien ne vous empêchera de danser avec "Baila". On ne vous laisse d'ailleurs pas vraiment le choix :
"O
Baila, O Baila / El nuevo ritmo de cha cha cha / La señorita que lo baila / O
Baila, O Baila / La música bella mexicana/ Santa Maria!/ Mi amor, mi chiquita /
De mi corazón / Feliz de la vida / Saca la cabeza / Ritmo Rock a mambo / Música
africana / Ritmo mexicano / Saca la cabeza"
Il faut sans doute avoir été ermite durant les 50 dernières années pour avoir échappé à la relecture funk qu'Herbie Hancock a faite de son propre « Watermelon man » en 1973.
Mais connait-on aussi bien le chant pygmée de retour de chasse qui a inspiré son introduction rythmique ?
Je ne sais pas pour vous, ni pourquoi, mais ce morceau des Ba-Benzélé me donne irrépressiblement envie de rejoindre la position horizontale et le sommeil.
Ou le rêve éveillé, c'est selon.
À tel point que j'ai cru pendant longtemps que c'était une berceuse.
La fatigue due à la chasse sans doute.
Pygmées Ba-Benzélé — « Solo de Hindewhou (sifflet) » — 1966
Le nom de la flûte Hindewhou est une onomatopée reproduisant l'alternance, caractéristique de cet instrument, de son vocalisés puis soufflés dans cette flûte taillée dans une tige de papaye.
(photo : Simha Arom)
-------------------------------
Et puis, parce qu'il est toujours bon de se remémorer les classiques, je vous propose d'écouter à nouveau la version qu'en donne Bill Summers au début et à la fin du morceau d'Herbie Hancock. Il troque pour l'occasion la flute Hindewhou pour une bouteille de bière bien accordée.
Herbie Hancock — « Watermelon man » — 1973
Bonne journée la compagnie !
Ou plutôt bonne nuit...