lundi 29 avril 2024

Les Nuits de Saïgon au mitan des sixties : Phương Tâm

 

 

La carrière musicale de Phương Tâm à Saïgon est météorique. A seize ans à peine, elle devient chanteuse professionnelle dans la capitale du Viet-Nam du sud, dans un pays en guerre où la présence américaine est toujours plus forte. Elle choisit de placer son répertoire sous l'influence directe de la puissance d'Outre-Pacifique, qui excite alors, il est vrai, les oreilles de la planète entière. La nuit, elle passe d'un établissement à l'autre, motorisée par son paternel qui la transporte de night-club en night-club dans la partie huppée de Saïgon. Puis l'amour arrive et l'arrache à cette vie à 100 à l'heure et Phương Tâm plaque tout, à 21 ans, pour une relation interdite avec un toubib de l'armée. En deux ans, de 1964 à 1966, elle a cependant eu le temps d'enregistrer de nombreux hits qui auraient pu rester ensevelis dans les décombres de l'histoire (l'exil d'un côté, le puritanisme intransigeant des viet-congs de l'autre se conjuguant pour faire disparaître les traces de cette aventure musicale) sans l'obstination de sa fille qui découvrit tardivement - et d'abord avec incrédulité - cette facette de la vie se sa chère maman. Une très bonne compilation sous l'étiquette Sublime Frequencies est née de sa quête (vous la trouverez ici). Plonger donc dans le bain avec un de ses morceaux les plus toniques :

Phương Tâm - Có Nhớ Đêm Nào (Souviens-toi de la Nuit) [1964]


Autre facette fascinante de cette discographie nocturne :

Phương Tâm - Đêm Huyền Diệu (Nuit Magique) [1965]



jeudi 18 avril 2024

Un hymne garage perdu et retrouvé : Art Guy "Where You Gonna Go?" (1967)

 

Le mec faisait de la musique dans un groupe avant (c'était le batteur d'un groupe de surf, les New Dimensions), il en fera aussi après (ce sera celui des Smokestack Lightnin') mais en 1967, il enregistre sa seule et unique galette sous son propre nom. Y figure un des hymnes longtemps perdus du garage. D'abord uniquement distribué comme disque promotionnel de l'étiquette Valiant, le morceau ne rencontra pas son public immédiatement, mais finit par se retrouver sur de nombreuses compils et par être réédité en single en 2020. C'est un des brulots les plus incendiaires de l'époque :

Art Guy "Where You Gonna Go" (1967)

 


Vous trouverez une roborative interview ici.


lundi 8 avril 2024

Minimalisme extrêmiste et premiers pas du rock'n'roll en France : Jean-Baptiste Reilles alias Mac Kac (1956)

  

La France n'a pas forcément réagi au quart de tour mais il fallait bien que quelqu'un s'y colle et ce fut un batteur un peu rondouillard et barbichu, originaire de Sète qui alluma la mèche. Nous sommes en 1956 et il s'agissait d'être dans le coup quand le jazz-band s'avisa enfin de jouer rock'n'roll quelques dizaines de mois après qu'un jeune type au sex-appeal renversant ait lancé les hostilités du côté de Memphis dans la vallée du Mississippi. Jean-Baptiste Reilles, la quarantaine déjà bien avancée, saisit alors l’occasion par les cheveux et enregistre un certain nombre de faces pour l'étiquette Versailles, qui postulent avec d'excellents arguments au titre de premiers disques de rock'n'roll hexagonaux, ce qui ne tournait certes pas nécessairement encore très rond dans les esgourdes du grand public et pas plus à vrai dire dans celles plus distinguées des esthètes amateurs de jazz. Dans cette première rafale, une ode à la dipsomanie la plus résolue se distingue par son radicalisme esthétique. La chose secoue, on vous prévient mais, sans conteste, c'est largement mieux que de se casser une patte.

Mac Kac & His French Rock'n'Roll "J'vais m'en jeter un derrière la cravate" (1956)

On peut aller voir là pour en savoir plus.





mercredi 27 mars 2024

Mort Garson (1976) : Musique électronique pour les plantes et pour ceux qui aiment les plantes

 

Dans la catégorie OVNI, celui-ci se pose là comme une fleur. Le projet est tout simple : il s'agit d'un disque pour vos plantes vertes que le compositeur précurseur de musique électronique Mort Garson a composé en 1976. Pour se le procurer, il fallait cependant être au bon endroit au bon moment puisque la galette était réservée aux acheteurs d'une plante d'intérieur dans un magasin de Los Angeles nommé Mother Earth, qui semble le commanditaire de la chose (les acheteurs d'un matelas Simmons auprès d'un point de vente Sears y eurent cependant aussi droit). La suite de morceaux s'appelle Plantasia et voici la liste des titres (entre crochets nous ajoutons le nom savant de la plante pour que vous puissiez fournir à votre plante préféré le morceau qui lui est spécialement dédié en minimisant les risques de vous tromper).

1. Plantasia

2. Symphonie pour la plante araignée [Chlorophytum comosum]

3. Blues des larmes d'ange [Soleirolia soleirolii]

4. Ode à la violette africaine [Saintpaulia]

5. Concerto For Philodendron & Pothos

6. Rhapsodie en vert

7. Swingin' Spathiphyllums

8. Vous n'êtes pas obligé de promener un bégonia

9. Ambiance douce pour adiante

10. Musique pour apaiser la plante serpent sauvage [Sansevieria trifasciata]

 

Mais, une fois n'est pas coutume, voici le disque en entier :

PS : L'album a été réédité en 2019 sur l'étiquette Sacred Bones Records. Merci à François P. pour l'improbable découverte.

 


vendredi 15 mars 2024

Accordé à l'accordéon : un petit tour dans l'histoire du piano à bretelle tyrolien

 

Aujourd'hui la Cellule plonge tête baissée dans un champ musical qui ne manquera pas de faire frémir certains : l'accordéon tyrolien. Comme on n'y connaît pas grand chose, On cale notre rétroviseur et on se laisse d'abord embarqué par un morceau qui nous a accroché l'oreille au hasard d'une compilation.

Difficile de donner des informations sur ce premier morceau. Celles qu'on trouvent sur la toile sont rares et partiellement contradictoires. Un duo d'accordéons (les frères Mikulas) joue avec un guitariste (Franz Zurst). Tous sont originaires du Tyrol. Nous sommes en 1931 ou peut-être en 1937. Le disque est sorti chez Polydor, étiquette où l'on trouve deux autres rares morceaux du trio. Le compositeur est Rudolf Strohmayer. Voilà tout. Sinon, la compilation où nous l'avons déniché ("Accordions of The World") est très recommandable, même si son livret n'est pas très bavard, on l'aura compris.

Mikulas Brüder & Zurst - Wiener Heurigen Marsch

Nous avons trouvé une version récente par un ensemble du genre folklorique tout à fait classique.

Jagawirtmusi  -Wiener Heurigen Marsch (2021)

 

Et puis pour changer, voici un autre groupe de musique tyrolienne beaucoup moins à cheval sur les conventions. Le folklore est ici secoué avec une autre énergie et le morceau est devenu un temps, à la maison, l'hymne national d'Amélie (deux ans). On vous aura prévenu.

 Attwenger "He-U" (1991)

 


 



dimanche 25 février 2024

Tiens, un pur tube soul de 2023 : Eli 'Paperboy' Reed.

 

Il n'y en a pas tant que ça alors ç'eût été bête de le louper. Heureusement, la Cellule veille!

Eli 'Paperboy' Reed "IDKWYCTD (I Came To Play)" (2023)



samedi 17 février 2024

Impérial : quand Sam Cooke rencontre Little Anthony (1959)

 


Quand Little Anthony rencontre Sam Cooke en 1959 à New-York, ce sont pas tout à fait deux générations qui entrent en contact, mais presque. Jerome "Little" Anthony Gourdine, à tout juste dix-neuf piges, est le leader d'un groupe de doo-wop qui vient de changer de nom - les farceurs ("Jesters") sont devenus les Imperials tout de même plus majestueux - et qui est sur le point de se transformer en machine à tubes qui vont squatter les charts pop du début des 60's. Sam Cooke, de dix ans son aîné, est quant à lui tout en haut de l'affiche, considéré depuis longtemps comme l'un des plus grands musiciens noirs que l'Amérique ait jamais enfanté. Les puristes ont pleuré sa désertion du circuit gospel mais sa popularité est immense. La collision imprévue de l'étoile à son zénith et de la jeune pousse donne naissance à un des morceaux les plus intenses de la période (qui détonne passablement dans la discographie du petit Anthony).

Little Anthony & The Imperials - I'm Alright (1959)